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Tchad : les chefs de la transition veulent rester au pouvoir

8 mars 2024

Le Premier ministre Succès Masra sera investi dimanche. Le chef de la junte a déposé sa candidature à la présidentielle. Selon des observateurs, le scrutin est joué d’avance.

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Le Premier ministre Succès Masra (gauche) et le président de transition Mahamat Idriss Déby (droite)
A moins d’un an de la présidentielle, le chef de la transition (à droite) avait nommé le Premier ministre Succès MasraImage : ISSOUF SANOGO/DENIS SASSOU GUEIPEUR/AFP/Getty Images

Le Premier ministre Succès Masra sera désigné candidat à la suite d’une convention populaire qui aura lieu dimanche à N'Djamena au Tchad. Cette candidature fera suite à celle du président de la transition militaire qui s’est déclaré il y a quelques jours. L’ancien parti au pouvoir a ainsi déposé, mercredi (06.03.2024), le dossier de candidature de Mahamat Idriss Déby à l’ouverture du dépôt des dossiers.

Une coalition de plus de deux cents partis soutient sa candidature. A son arrivée au pouvoir, Mahamat Déby promettait aussitôt de rendre le pouvoir aux civils par des élections après une transition de 18 mois mais, ce terme échu, il l'avait prolongée de deux ans.

La transition a été marquée par une manifestation sanglante qui a fait plusieurs morts le 20 octobre 2022. Des militants du Premier ministre Succès Masra ont été tués. Ce dernier a récemment accepté d’être Premier ministre pour boucler la transition. Le scrutin présidentiel du 06 mai va se tenir sans l’un des principaux opposants. Yaya Dillo a été tué lors de l’assaut de l’armée au siège de son parti.

L’enseignant-chercheur à l’université de N’Djamena, Marita Toglo-Allah, rappelle que les dirigeants de la transition ne devaient pas être candidats au scrutin présidentiel. Pour lui, la candidature de Succès n'est donc là que pour donner un alibi démocratique à un résultat connu d'avance.

"Le scrutin présidentiel est joué d’avance" (Marita Toglo-Allah)

Et même déjà la date des élections, c'est brusque, pour ne pas dire catastrophique. On a surpris la population avec la date des élections, la date des investitures des candidats. Et ça, ça dépasse l'entendement.

Les deux candidats Succès Masra et Mahamat Idriss Déby Itno, est-ce que clairement vous pensez que l'idéal pour eux ce serait de démissionner avant d'entrer en campagne ?

Normalement, il était dit qu’ils ne doivent pas se présenter aux élections. Ici on est toujours habitué aux choses truquées, ça c'est une réalité.

Professeur, pour dire clairement les choses, certains disent sur les réseaux sociaux que Succès Masra est juste candidat pour la forme. Est-ce que c'est comme ça que vous voyez cela ?

Beaucoup de gens pensent que c'est pour accompagner. Ceux qui le suivent ne sont pas pour accompagner quelqu'un, parce que y a une réelle volonté de changement. Même actuellement par exemple, on sait que y a une grève. Ce n’est pas une condition également favorable pour aller aux élections.

Est-ce que vous pensez que ce scrutin sera ouvert, transparent ?

On ne voit pas les conditions de transparence, c'est juste de la peinture. Le scrutin est joué d'avance parce qu’il y a même des gens qui ont discrédité l’Agence nationale chargé des élections (Ange). 

L'ancien candidat à l'élection présidentielle du Tchad, Yaya Dillo, donne une conférence de presse le 30 avril 2021 à N'djamena
Le principal opposant au pouvoir tchadien Yaya Dillo quelques jours avant l’ouverture des dépôts de candidatures pour la présidentielle Image : Issouf Sanogo/AFP

Donc le scrutin est joué d'avance pour le président au pouvoir ?

C’est sûr, le scrutin est joué d’avance. Si on voit que l’un des candidats majeurs [Yaya Dillo] vient d’être éliminé, ce n’est pas pour s’arrêter là.

Et donc vous pensez qu’une candidature de Succès Masra ne va pas peser face à Mahamat Idriss Deby ?

Ce qui est sûr, il [Succès Masra] est populaire. Mais maintenant ce n'est pas la popularité qui qui peut apporter des solutions acceptables. Parce que d'un côté on sait qu’il y a des ingérences étrangères qui pèsent trop sur ce pays-là, le Tchad. Et maintenant est-ce que les gens seront du côté de ceux qui espèrent le changement ou bien du camp de ceux qui ne veulent pas le changement ? C'est ça le problème.