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Sénégal : une audience décisive dans l'affaire Ousmane Sonko

12 décembre 2023

Au Sénégal, le tribunal de première instance de Dakar doit se prononcer sur la possible réintégration de l'opposant sénégalais sur les listes électorales.

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Combinaison de deux portraits: Macky Sall et Ousmane Sonko
Ousmane Sonko sera fixé bientôt sur sa radiation ou non des listes électorales. Ses avocats dénoncent une machination de Macky SallImage : Presidency of Senegal / Handout/AA/picture alliance | Seyllou/AFP/Getty Images

Au Sénégal, la justice doit se prononcer sur la possible réintégration de l'opposant Ousmane Sonko sur les listes électorales. De cette décision dépendra sa candidature à la présidentielle de février prochain.

Il y avait affluence, ce matin, devant le palais de justice de Dakar. Des hommes et des femmes ont fait la queue dans le calme pour assister à cette audience décisive dans l'affaire Ousmane Sonko.

La sécurité a été renforcée, les personnes contrôlées, la circulation des motos interdite aux abords du tribunal.

Et d'emblée, l'audience a été houleuse, 

Affluence et sécurité renforcée

Il y avait affluence, ce matin, devant le palais de justice de Dakar. Des hommes et des femmes ont fait la queue dans le calme pour assister à cette audience décisive dans l'affaire Ousmane Sonko.

La sécurité a été renforcée, les personnes contrôlées, la circulation des motos interdite aux abords du tribunal.

A peine ouverte, l'audience a été suspendue pendant une dizaine de minutes en raison de l'absence des avocats de la défense. A leur arrivée, ils ont affirmé ne pas avoir été informés du changement de salle.

Des officiers de police sénégalais montent la garde les bras croisés devant le Palais de justice de Dakar (archive de juillet 2023)
Le préfet de police de Dakar a renforcé la sécurité pour la tenue de l'audience concernant Ousmane SonkoImage : SEYLLOU/AFP/Getty Images

La défense attaque Macky Sall

Ousmane Sonko est représenté par 35 avocats, la partie adverse par cinq défenseurs et l'Agent  judiciaire de l'Etat. La défense a donc protesté contre le temps imparti aux plaidoiries : le juge avait accordé quatre heures à chaque partie. Les avocats d'Ousmane Sonko réclamaient vingt minutes par avocat.

Les premières interventions de la défense se sont concentrées sur Macky Sall. Maître Ousseynou Fall reproche au président sortant, je cite, de "s'acharner sur Sonko" pour ne pas avoir "digéré d'être écarté du troisième mandat" [présidentiel].

Plusieurs de ses confrères dénoncent à la barre des vices de forme et remettent en cause la radiation d'Ousmane Sonko des listes électorales qui ne lui aurait été notifiée ni dans les formes, car sans l'affichage prévu par la loi, ni dans les temps, car cinq jours après l'arrestation du prévenu.

Ils qualifient le ministre de la Justice, Ismaela Madior Fall, "d'analphabète en droit pénal" pour avoir évoqué la radiation de leur client sur des plateaux de télévision alors que celle-ci n'était pas effective, selon eux.

La défense estime que l'opposant est "victime d'un abus de pouvoir par des agents de l'Etat" et souligne que leur client est en conflit avec ces agents et non avec l'Etat du Sénégal. Ils mettent en garde contre une démolition de la démocratie.

Les avocats d'Ousmane Sonko invoquent la Charte des Nations unies et réclament que les droits fondamentaux de leur client soient respectés. Ils demandent la délivrance de fiches de parrainage à Ousmane Sonko, qui n'est pas condamné et devrait donc pouvoir être candidat à la candidature.

Le collectif d'avocats d'Ousmane Sonko dénonce une manœuvre politique orchestrée par le président de la République pour empêcher son principal rival de se présenter aux élections de février 2024. Car, si elle est confirmée, sa radiation des listes électorales rendra Ousmane Sonko inéligible.

Après la condamnation d'Ousmane Sonko, des scènes d'émeute à Dakar: un policier de dos et devant lui, des manifestants qui s'enfuient en courant dans la rue où des pneus brûlent (archive de juin 2023)
La condamnation d'Ousmane Sonko a donné lieu à des manifestations réprimées dans la violence, en juin 2023Image : Leo Correa/AP/picture alliance

La réponse de l'Etat

A la mi-journée, l'audience a de nouveau été suspendue. Le cabinet de l'un de ses avocats nous a indiqué qu'elle risquait de durer longtemps, étant donné le nombre d'avocats de la défense et le caractère sensible de l'affaire.

Un avocat de l'Etat estime qu'Ousmane Sonko n'a pas usé de son droit de recours au mois d'août. "[Il] avait un délai pour agir il ne l’a pas fait. Son inactivité a eu des conséquences et a été sanctionné par la loi", déclare l'avocat qui souligne que "l’Etat du Sénégal n’a pas de cours de démocratie à recevoir".  

L’Agent judicaire de l'Etat rétorque à la défense d'Ousmane Sonko qui accuse l'Etat d'avoir séquestré leur client que "l’État du Sénégal prend part à ce procès parce qu’ils ont attaqué les administrations"

Une issue incertaine

Le 17 novembre dernier, la Cour suprême du Sénégal a en effet cassé un jugement précédent prononcé à Ziguinchor qui ordonnait l'annulation de la radiation de l'homme politique, suite à sa condamnation à deux ans de prison, au mois de juin, dans une affaire de mœurs. La Cour suprême a décidé que cette radiation devait être rejugée en première instance et c'est l'objet de l'audience d'aujourd'hui.

Les juges rendront leur décision en délibéré au jeudi 14 décembre.

Quel que soit le jugement, les deux parties qui s'opposent – Ousmane Sonko et l'Etat sénégalais – auront la possibilité de faire appel sous dix jours.

Or, les dossiers de candidatures pour la présidentielle doivent être déposés devant la Cour constitutionnelle d'ici au 26 décembre. Les délais seront difficiles à tenir pour Ousmane Sonko, même si la justice devait lui donner raison.

Les précédents procès de l'opposant ont provoqué des manifestations chez ses partisans, plusieurs d'entre eux sont morts dans la répression de leurs rassemblements.

Hier [11.12.23], Mouhamed Tété Diédhiou, de la plateforme Lacos (les Leaders alliés du candidat Ousmane Sonko), a appelé les sympathisants de la coalition "Sonko président" au "calme et à la discipline". Il invite aussi les militants à la "vigilance" pour ne pas risquer le démembrement de leurs structures après la dissolution du parti d'Ousmane Sonko, le Pastef.

La Lacos affirme par ailleurs qu'Ousmane Sonko aurait eu un nouveau malaise, hier.