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Marikana, le talon d'achille de Ramaphosa

16 février 2018

Le président sud-africain Cyril Ramaphosa n'est à ce jour impliqué dans aucune affaire de corruption. Mais personne n'a oublié le rôle qu'il a joué dans la répression de la révolte des mineurs de Marikana en 2012.

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Südafrika - neuer Präsident Cyril Ramaphosa
Image : picture-alliance/AP Photo

"Le massacre de Marikana en 2012 colle à la peau de Cyril Ramaphosa."(Adrien Barbier, correspondant à Johannesburg du quotidien français "Le Monde")

Militant anti-apartheid, depuis les années 1970, Cyril Ramaphosa, 65 ans, est avocat de formation. Après avoir échoué, en 1999, à prendre la présidence du parti face à Thabo Mbeki, il se retire de la vie politique, se lance dans les affaires et bâtit un empire financier.

Sa fortune s’élèverait à 378 millions d’euros, selon le classement 2015 du magazine Forbes.

En dépit de son image d’homme intègre, certains lui reprochent néanmoins d’avoir été pendant longtemps un proche de Jacob Zuma, sans avoir jamais dénoncé la corruption du pouvoir.

Des soldats sud-africains réprimant des travailleurs sur les mines de Marikana en 2012, en Afrique du sud
Des soldats sud-africains réprimant des travailleurs sur les mines de Marikana en 2012, en Afrique du sud

Selon Adrien Barbier, correspondant à Johannesburg du quotidien français "Le Monde", Cyril Ramaphosa traîne un boulet qui lui colle à la peau: le massacre de Marikana.

"Cela a vraiment scandalisé l’opinion et ça a vraiment marqué un point de rupture entre l’ANC et son électorat. Pour Cyril Ramaphosa, c’est très problématique, parce que lui-même est un ancien syndicaliste et c’est vraiment de là qu’il vient. Il faisait partie du conseil d’administration de la mine à ce moment là", explique-t-il au micro de la DW.

Manque de preuves

D’autres analystes pensent aussi que Jacob Zuma n'aurait pas hésité ces dernières semaines à sortir des dossiers sur Ramaphosa s'il y en avait. Surtout que l’ex-président qui contrôlait les services secrets aurait pu faire fuiter des informations dans la presse pour éliminer son concurrent ou bien sauver sa peau en menaçant de le faire.

Rien de cela ne s'est produit. Il faudra donc juger le nouveau président sud-africain sur ses actes. Et notamment sur la manière dont il va laisser la justice poursuivre ses enquêtes sur Jacob Zuma et ses proches.

Nouveau départ

Au lendemain de sa prestation de serment, le nouveau président sud-africain Cyril Ramaphosa a dévoilé les grands axes de sa politique devant le Parlement, lors de son tout premier discours sur l'état de la nation.


"Nous devons mettre derrière nous toute la négativité qui a perturbé notre pays parce qu'un nouveau départ nous attend. Un fantastique départ est là", a affirmé Cyril Ramaphosa devant les parlementaires. 

 Rappelons qu’après plus de neuf ans à la tête de l’Afrique du sud, Jacob Zuma, a été, mercredi, contraint à la démission.

Avenir judiciaire incertain

Selon le chercheur Daniel Silke cité par l'AFP, en renonçant à son poste, Jacob Zuma "s'est trouvé propulsé dans un autre monde". "Il entre dans une période embarrassante, problématique et incertaine", estime-t-il.

Jacob Zuma pourrait être fixé au plus vite, dans un dossier qui l'empoisonne depuis une décennie : l’affaire d'un contrat d'armement impliquant notamment le Français Thales. Jacob Zuma est également soupçonné d'avoir perçu au moins 783 versements de pots-de-vin pour ce juteux contrat de 4,2 milliards d'euros signé en 1999 par l'Afrique du Sud avec plusieurs entreprises européennes, alors qu'il était vice-président.

Le parquet devra par ailleurs juger de l’opportunité, ou non, de relancer les accusations qui visent l'ancien président. En 2009, ces accusations avaient été abandonnées.

Enfin, dans un rapport explosif de 335 pages publié en 2016, la médiatrice de la République a montré, preuves à l’appui, le pillage à ciel ouvert de l’économie sud-africaine, par la richissime fratrie d'hommes d'affaires, les Gupta. Ce pillage aurait été rendu possible par la complicité de Jacob Zuma.

C’est dans ce cadre que la police a perquisitionné, jeudi, le domicile des Gupta à Johannesburg et qu'un mandat d'arrêt a été émis contre l'un des membres de cette famille.

Mise en place en janvier dernier par Jacob Zuma lui-même, une commission d'enquête judiciaire va plancher sur toutes les affaires de corruptions présumées. Si l’ancien président était inculpé et condamné, il lui resterait une dernière alternative, demander la grâce au président de la République, Cyril Ramaphosa.

Photo de Eric Topona Mocnga
Eric Topona Journaliste au programme francophone de la Deutsche WelleETopona