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Première condamnation d'un Etat pour inaction climatique

Hugo Flotat-Talon | Avec agences
9 avril 2024

La Cour européenne des droits de l'Homme vient de condamner la Suisse pour son inaction face au changement climatique. Une nouvelle qui réjouit jusqu'en Afrique.

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Des militantes de l'association suisse les "Aînées pour la protection du climat" photographiées avec de nombreux journalistes, micros et caméras autour d'elles
L'association suisse les "Aînées pour la protection du climat" regroupe 2.500 femmes âgées de 73 ans en moyenneImage : Christian Hartmann/REUTERS

On parle déjà d'un jugement "historique". Ce mardi 9 avril, la Cour européenne des droits de l'Homme, basée à Strasbourg en France, a condamné la Suisse pour inaction climatique. C'est la première fois qu'un Etat est reconnu coupable dans une telle affaire. 

Que dit la Cour ? 

La CEDH estime que la Suisse a enfreint la Convention européenne des droits de l'Homme, en particulier le "droit à la vie" (article 2) et le "droit au respect de la vie privée et familiale" (article 8), en ne luttant pas suffisamment contre le réchauffement climatique. La Cour avait reçu une requête de l'association suisse des "Aînées pour la protection du climat". Ces femmes considéraient que Berne ne prenait pas de mesures suffisantes pour atténuer les effets du changement climatique, en violation donc de leurs droits à la vie, à la santé et au bien-être.

C'est la première fois que cette Cour condamne un Etat pour son manque d'initiatives pour lutter contre le changement climatique. Elle se prononçait dans trois affaires climatiques distinctes. Les requêtes de plaignants français et portugais ont été rejetées. 

Qu'est-ce que cela peut changer ? 

L'arrêt de la CEDH est définitif. La Suisse a l'obligation de le respecter et donc de redoubler d'efforts pour lutter contre le changement climatique. "Cet arrêt détaillé sera analysé avec les autorités concernées et les mesures que la Suisse doit prendre pour l'avenir seront examinées", a déjà fait savoir le gouvernement fédéral. Le comité des ministres du Conseil de l'Europe vérifiera que la Suisse se conforme à cet arrêt.

L'arrêt fait jurisprudence : il pourra servir de référence dans d'autres dossiers portant sur le changement climatique. Et la décision s'applique dans les 46 Etats membres du Conseil de l'Europe. Pour la Cour, un Etat doit ainsi avoir des objectifs précis en matière de réduction des gaz à effet de serre, un budget carbone ou tout autre méthode équivalente de quantification des futures émissions de GES, ainsi qu'un mécanisme de suivi pour vérifier que ces objectifs sont atteints. 

Que disent les défenseurs de l'environnement ? 

Gros plan sur le visage de Greta Thunberg, à gauche, et de Rosmarie Wydler-Walti, à droite, de l'association suisse les "Aînées pour la protection du climat"
La militante suédoise pour le climat Greta Thunberg, à gauche, était présente à Strasbourg ce 9 avril, pour apporter son soutien aux requérants devant la CEDHImage : Christian Hartmann/REUTERS

"Ce n'est que le début en matière de contentieux climatique : partout dans le monde, de plus en plus de gens traînent leur gouvernement devant les tribunaux pour les tenir responsables de leurs actions", a salué la militante suédoise Greta Thunberg, présente à Strasbourg pour la décision.

"C'est une bonne nouvelle, le juge a vraiment établi un précédent", a aussi salué, sur la DW Afrique, Stella Tchoukep, chargée de campagne forêt pour Greenpeace. "Ça va susciter chez d'autres juges ce besoin de davantage s'intéresser aux questions climatiques et de prendre les décisions qui s'imposent", veut croire cette militante. 

Alors que le Sahel subit en ce moment une vague de chaleur dramatique, l'activiste basée au Cameroun, rappelle les conséquences dramatiques du changement climatique en Afrique. "On a d'abord un impact sur la santé", dit-elle, citant le développement probable des maladies liées à l'eau. "Il y a aussi un impact sur l'agriculture et donc sur la sécurité alimentaire", insiste-t-elle. "Les peuples autochtones, les communautés locales qui n'ont pas assez de ressources ne pourront pas inverser la tendance", déplore Stella Tchoukep. "Et donc cette décision est plus que salutaire."