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Au Cameroun, des taxes et des rapts financent les rebelles

Isaac Kaledzi | Marco Wolter | Avec agences
26 mai 2023

Un groupe de femmes a été enlevé pour avoir manifesté contre les rackets et taxes imposés par les rebelles indépendantistes à la population.

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Vue aérienne de Bamenda
Un conflit meutrier secoue les deux régions anglophones du Cameroun depuis fin 2016Image : Jean Marie Ngong Song/DW

La colère monte au Cameroun après l’enlèvement d’une trentaine de femmes le week-end dernier par des rebelles séparatistes dans l’ouest du pays. Selon les autorités, elles auraient été “sévèrement torturées”.   

Depuis ce kidnapping, une vidéo circule sur les réseaux sociaux. On y voit un rebelle séparatiste présumé s’adresser à un groupe de femmes, dont certaines sont très âgées. Elles se font menacer, insulter. Des hommes armés affirment que ces femmes ont été enlevées pour avoir osé contester les taxes imposées à la population. Les séparatistes disent prélever ces taxes pour leur "effort de guerre pour l’indépendance". 

Une taxe pour enterrer un proche 

Ainsi, tout a un prix. Il y a les taxes mensuelles : 10.000 francs CFA pour les hommes, 5.000 pour les femmes. Il faut payer pour pouvoir se marier ou même pour avoir le droit d’enterrer un proche.  

Ngongba Asumpta Lum est la fondatrice d’une ONG pour l’égalité des genres. Pour elle, ce kidnapping est une tentative de faire taire les femmes qui jouent souvent un rôle déterminant dans la résolution des conflits.  

"C’est un coup dur pour nous en tant qu'actrices de la société civile, en particulier pour les organisations dirigées par des femmes et les militants qui luttent pour le retour de la paix, déplore Ngongba Asumpta Lum. En tant que mères de famille, nous sommes très affectées parce que tout cela va trop loin. Je pense que c’est tout le contraire d’un retour de la sécurité."

Des journalistes tiennent des pancartes pour protester contre la mort de confrères à Bamenda
Les journalistes sont également la cible d'assassinats dans la crise anglophoneImage : Mbuh Stella/DW

Enlèvements en hausse  

Pour Sally Mbumien, une responsable locale de Bamenda, les rebelles franchissent une nouvelle étape dans l'intimidation et la répression de la population. "Arrêter ces femmes qui symbolisent le pouvoir féminin traditionnel est la pire chose qui pouvait nous arriver, estime-t-elle. Elles ont simplement exprimé leur point de vue sur des décisions politiques relatives à la collecte des impôts que dénoncent les habitants des villages. Non seulement cela politise les institutions traditionnelles du pouvoir des femmes mais c'est aussi une insulte à la féminité, à la maternité. Ce kidnapping crée un grave précédent."

Certains experts estiment aussi que le recours aux enlèvements et la réclamation de rançons pourrait être un nouveau moyen pour les séparatistes de renflouer leurs caisses.

Les rebelles accusent le coup de la lutte contre le blanchiment d’argent et “les efforts déployés par certains pays occidentaux dans la lutte contre le terrorisme et son financement”, explique Agbor Balla à la DW. Cet avocat spécialisé dans les droits de l'Homme note que "le nombre d'enlèvements est en hausse", notamment les kidnappings de groupes d’individus.

Symbolbild I Journalismus
Marco Wolter Journaliste au programme francophone de la Deutsche Welledw_francais